La technologie au service de patients défigurés par le cancer

Un projet audacieux d’une équipe dirigée par le professeur

Jacques de Guise reçoit 100 000 $

Une proposition de projet de recherche original d’une équipe dirigée par le professeur Jacques de Guise, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en imagerie 3D et ingénierie biomédicale, a été retenue à l’issue du concours 2018 du programme intersectoriel Audace. Elle est une des 22 propositions financées par ce programme innovant et hautement compétitif.

Le professeur et son équipe bénéficieront ainsi d’une subvention de 100 000 $, un montant qui, espère-t-on, aura un effet de levier qui permettra de recueillir d’autres sommes et d’attirer des partenaires pour assu

Les professeurs Jacques de Guise et Yvan Petit

rer le succès de ce projet interdisciplinaire.

Le programme Audace est ouvert à des équipes constituées de chercheurs issus d’au moins deux des trois secteurs couverts par les Fonds de recherche du Québec (Nature et technologies, Santé, Société et culture) et vise à soutenir des projets audacieux, voire à risque, et à fort potentiel de retombées.

Le projet soumis par l’équipe dont fait également partie le professeur Yvan Petit de l’ÉTS s’intitule De l’ombre à la lumière – Vers un accompagnement interdisciplinaire des patients au cours de leur Odyssée de chirurgie oncologique délabrante du visage et de reconstruction par prothèse de remplacement.

Même si la prise en charge des cancers de la tête et du cou a énormément progressé, certaines chirurgies oncologiques restent encore très délabrantes et nécessitent des reconstructions complexes associant souvent chirurgie plastique et épithèses (prothèses de comblement ou de remplacement d’une ou plusieurs parties du visage).

Chaque année au Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM), plus de 400 nouveaux patients sont pris en charge par la Clinique de stomatologie et prosthodontie-maxillo-faciale. Parmi eux, plus d’une vingtaine sont traités au moyen d’épithèses.

La plupart des épithèses sont confectionnées de façon relativement conventionnelles et ne profitent pas suffisamment des progrès récents du design numérique, de l’ingénierie de modélisation, de la réalité virtuelle, des arts numériques et de la science des matériaux.

Les patients font face à une grande détresse physique et psychologique, reliée entre autres à la perte et à la reconstruction éventuelle de leur visage, et par le fait même de leur identité. La conception de ces épithèses et leur acceptation par les patients et

Eric Moger est l’un des premiers au monde à avoir une épithèse sur mesure grâce à l’impression 3D. Photo: Geoff Pugh, The Telegraph

leurs proches sont des enjeux majeurs pour une restitution fonctionnelle et esthétique du visage et un retour à la vie normale.

L’audace du projet de l’équipe sous la direction du professeur de Guise repose sur la mise en commun de multiples savoirs, savoir-faire, et savoir-être afin de non seulement améliorer la conception, le rendu, le comportement et l’intégration esthétique, voire artistique, de ces épithèses, mais aussi d’engager les patients et leurs proches dans un véritable processus de réappropriation de leur identité ou de création d’une nouvelle identité.

Ce projet s’appuiera sur une équipe hautement interdisciplinaire regroupant à la fois des compétences médicales (imagerie, chirurgie plastique, ORL, prosthodontie, psychiatrie, éthique, santé publique – Matthieu Schmittbuhl, Michel Alain Danino, Mona Gupta, François Gagnon, Simon-Pierre Charbonneau et Éric Dufresne du CHUM), d’ingénierie (modélisation 3D, prototypage virtuel, sciences des matériaux, impression 3D – Jacques de Guise et Yvan Petit de l‘ÉTS), des sciences sociales (partenariat de soins, gestion, philosophie, communication – Marie-Pascale Pomey et Vincent Dumez du CHUM et du Centre d’excellence sur le partenariat avec les patients et le public et Djahanchah Ghadiri de HEC Montréal,) ainsi que plusieurs disciplines artistiques (design, création, arts visuels, arts numériques – Claire Paillon et son équipe de la Société des Arts Technologiques), et des communications (Sylvie Gendreau des Cahiers de l’imaginaire).

Des patients partenaires (notamment Serge Dulude) et leurs proches qui ont déjà vécu l’expérience de ces interventions majeures seront présents à toutes les étapes afin d’aider et d’écouter les patients, mais aussi pour guider l’équipe vers des solutions mieux adaptées aux besoins.

Cette grande équipe bénéficiera par ailleurs du soutien de la compagnie Vizua, spécialisée en imagerie 3D.

Les retombées prévues sont majeures tant pour l’aide à la prise en charge que cette approche peut représenter pour toute l’équipe médicale que pour le développement, l’adaptation et le déploiement de technologies numériques d’imagerie 3D, de modélisation, de simulation, de réalité virtuelle et de fabrication additive spécifiquement pour des patients défigurés par le cancer.

De nouveaux concepts théoriques et pratiques seront aussi développés sur la question de la reconstruction des identités (personnelles, sociales, relationnelles) lors de transitions difficiles et de transformations profondes, de même que de nouvelles approches pour l’aide à cette reconstruction.

Plusieurs autres domaines d’applications ont déjà été identifiés et pourront bénéficier directement des connaissances issues de ce projet, soit la traumatologie (grands brûlés, accidents de la route, et autres trauma), les mastectomies, les colostomies, ainsi que l’aide au traitement des maladies de la peau (vitiligo, psoriasis, etc.).

 

Emmanuelle Berthou | Conseillère en communication
Service des communications